rahane1 a écrit :
on va dire que oui j'ai aussi pensé que 91% paraissait élevé mais les enfants d'aujourd'hui lisent pas mal de livres y compris les tout petits le marché du livre pour enfant est florissant ( il parait qu'en politique en ce moment tout le monde relit les fables de La Fontaine( observation malicieuse de journaliste à propos des citations très "in" dans les discours en ce moment)
à une époque où l'on pianote plus que de prendre la plume et que la main oublie l'écriture on ne a pas se plaindre que la lecture ( fut-elle de peu de chose ) résiste autant.
besoin de ne pas oublier certains process de l'imagination et de la pensée..
|
Que les enfants soient amenés à lire me parait presque aller de soi de par ce qui relève de cursus scolaires.
Cependant comment ne pas mentionner ce constat récurrent lié à l’apprentissage de la lecture, indiquant qu’à l’entrée en sixième, suivant des statistiques moyennes, « 15% des enfants ne sauraient pas lire et 20% ne comprendraient pas ce qu’ils lisent ».
Ces bases manquantes, quelques puissent être les causes et les raisons mise en avant, invite à penser que ces enfants ou jeunes adolescents ne pourraient de fait avoir aucune appétence d’ordre privée pour la lecture et pour le livre, hormis si celui-ci serait, comme on disait autrefois, un illustré ou désormais s’inscrivant dans le marketing florissant de la bande dessinée.
Comme ce phénomène de carence se trouve être invoqué depuis quelques décennies déjà, on peut supposer que ces enfants devenus adultes n’ont pas plus d’inclinaison à lire présentement qu’ils ne l’avaient auparavant.
De là, si on veut faire un état des lieux sur des choix de lecture, il faut se reporter à cet extrait de l’article du Figaro, où vient à se définir ce qui ferait tendances.
« Mais tout dépend ce que l'on entend par « livre ». Un livre, ce n'est pas forcément une oeuvre littéraire de haute volée. Si les romans policiers sont plébiscités, ce sont les livres pratiques qui sont en forte croissance, surtout ceux qui ont trait au développement personnel, à la santé et à la psychologie. Des livres sur le rangement, les secrets de l'intestin ou l'alimentation ont été particulièrement plébiscités ces derniers mois. C'est ce que les femmes lisent en premier pour 69 % d'entre elles, loin devant les romans. Les hommes préfèrent toujours les bandes dessinées... devant les livres pratiques. Les livres pour enfants affichent aussi de nettes progressions ».
Cette mise en perspective semblerait suffisante par ce qui se trouverait plébiscité, ainsi des lectures sur de méthodes ou des recettes touchant à des modes de vie particulièrement ceux traitant « de la bonne santé » ou des fiches de « monsieur bricolage ».
Tout cela resterait en marge et en retrait, pour reprendre cette formule un rien cynique, « de la part de temps de cerveau disponible » pour la captation des programmes télés.
Mais il y a présentement un autre créneau de lecture apte à attirer « le chaland cultureux », celui qui touche à l’ingénierie politique et à son attirail périphérique, non seulement du fait de l’insistante pesanteur liée à l’allongement sans limites ponctuant les échéances électorales, mais aussi par ses innombrables productions journalistiques à base de révélations ou d’enquêtes d’investigation vaguement sociologiques.
On n’oubliera pas de citer dans cette revue d’effectifs, des économistes – ou se pensant comme tels - plus ou moins atterrés, et les immanquables penseurs sur scène (les Onfray, Attali et autres Zemmour parmi les plus productifs et les mieux en cours sur la scène médiatique).
Ce qui apparait, dans le contexte fortuit et promotionnel de l’actuel salon du livre, montre que ces orientations et choix de lectures révèlent des préoccupations plus immédiates se tenant en des informations pratiques ou sur de fantasmagorique d’un imaginaire pulsionnel plus ou moins débridé. (Le livre érotique à l’eau rose ou en nuances de gris semblant répondre à de tels critères).
L’ancien rapport à l’écrit en ce qui le rattachait à une littérature stylée (sur des climats ambiants ou des mœurs d’une époque), à la poésie, à l’historiographie, à l’anthropologie et éventuellement à une pensée s’interrogeant sur elle-même (philosophie, spiritualité) n’a fait que s’effacer tel le portrait de Dorian Gray.
On peut le regretter, sans souscrire aux lamentations ou imprécations de déclinologues de toutes espèces, car ce que ces derniers se refusent de prendre en compte, c’est que l’implantation de champs culturels s’inscrivait dans un certain niveau d’exigence, qui n’était pas soumise aux lois d’une production de masse qui allait faire de la culture peu à peu « une denrée comestible ». Je pense à ce qu’à pu conceptualiser sur ce point Walter Benjamin, à travers un petit essai : « L'Œuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique ».
Ce que l’on nomme présentement culture par ce qui en ferait ses différents modes d’expression (littérature, musicale, cinématographique…) s’est cristallisé sur des récits nombrilistes au détriment de grands récits, sur les mauvais tempos énergétiques en ses plans d’immanence éliminant la primauté de l’harmonie, sur des divertissements dont l’évanescence n’a eu d’objet que de dépraver tout fondement esthétique et éthique.
Au fond, lorsque l’on vient à parler de culture, (et de son rapport à l’écrit) c’est qu’il s’agirait désormais de tout, sauf de cela.